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«Nous réclamons l’ouverture de la PMA à toutes les femmes, sans discrimination»

6 Juin

Article de Libération du 5 juin 2014

« En lançant ce manifeste depuis le Sud-Ouest, Marie et Ewenne ne s’attendaient pas à un tel succès. Elles espéraient 343 signatures, un clin d’œil au «manifeste des 343 salopes» qui, en 1971, avaient révélé avoir avorté, avant que la loi Veil ne légalise l’IVG. A ce jour, plus de 400 femmes ont tombé le masque en assumant noir sur blanc : «Je déclare avoir eu recours à une insémination avec donneur afin de fonder une famille.» Derrière elles, plus de 1  000 soutiens sont arrivés, notamment d’hétéros. »

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Témoignage de Morgane (15)

19 Jan

Je m’appelle Morgane, j’ai 41 ans…
J’ai depuis toujours désiré un enfant.
Mon rêve était de fonder une famille avec une femme que j’aimerais et qui pour moi serait égale concernant les droits et les devoirs par rapport à cet enfant. Je me voyais avec un p’tit bout, avec ma p’tite femme et notre amour plus fort que tout…Je me voyais fonder une famille entourée d’amour, une famille avec 2 mamans et l’amour de notre enfant…
Ce n’était pas un caprice que de désirer un enfant, c’était une envie, un désir de donner la vie, d’être mère et de partager avec ma compagne ce bonheur…Mais du rêve à la réalité, la route est longue, chaotique, difficile, parsemée de morceaux de verre pointus qui vous coupent à chaque pas les pieds….
Avec ma première compagne, j’ai essayé quand j’avais 20 ans avec un donneur par insémination artisanale : échecs sur échecs, tristesse, déception…
Les années ont passé : séparation, case départ…
Une nouvelle vie, un nouvel amour et toujours cette envie forte en moi d’avoir un enfant qui ne me quitte pas…
Je réitère avec ma nouvelle compagne par insémination artisanale. Au bout de 3 mois le type nous lâche…

J’ai alors 35 ans. La recherche d’un nouveau donneur m’épuise : expliquer, réexpliquer que ce sera sans rapport sexuel. Je fais le tour de mes connaissances masculines, ceux qui ne refuseront pas me diront : « je suis ok mais on fait ça naturellement »…Naturellement, mon corps le refuse, je ne peux pas, c’est impossible. J’ai épuisé mon carnet de connaissances…

Alors je me tourne vers la Belgique : une clinique accepte de pratiquer une insémination. Il n’y a, à cette époque, pas d’attente mais je dois suivre un protocole de stimulation ovarienne : piqûres dans le ventre, échographie tous les 2 jours, puis quand le follicule atteint sa taille, coup de fil à la clinique pour prévenir que c’est ok..

Je suis heureuse, je me mets à y croire, ma compagne jusque-là motivée commence à me délaisser totalement. Ce désir d’enfant, l’envie de donner la vie prend le dessus. Je suis maintenant seule à affronter cette aventure…

La dernière échographie montre 3 follicules assez mûrs pour pratiquer une insémination, ces 3 follicules sont comme des bébés, sur les 3 je sais qu’il y aura mon enfant. J’ai les larmes qui me montent aux yeux, je suis comme dans un rêve… Coup de fil à la clinique, j’ai 36 heures après la dernière piqûre pour me rendre en Belgique…Bruxelles, la Belgique, la clinique, j’y suis enfin…La salle d’attente se remplit à vue d’œil, je regarde ces femmes seules ou en couple. On m’appelle, c’est enfin mon tour. La dame qui va m’inséminer est celle qui m’avait reçue avec mon amie… »Alors vous avez un follicule de mûr? » Oui j’en ai trois.

« Trois! Mais vous vous rendez compte trois! Je ne veux pas trois follicules mais un, je ne vais pas vous inséminer, je n’en veux qu’un! Ah vous les Françaises et vos gynécologues, vous ne comprenez rien! »

La terre s’écroule sous mes pieds, je me mets à pleurer, elle a la fiole d’insémination dans la main, je la supplie de m’inséminer lui disant que sur les trois, tous ne marcheront peut- être pas…Elle ne veut rien savoir…En partant je regarde une dernière fois la salle d’attente pleine et je me dis que l’une d’elle portera mon enfant…

Sur le chemin du retour, je n’arrête pas de pleurer, je me sens humiliée, rabaissée…Après toutes les prises de sang subies, tous les examens, les piqûres, les échographies, je me sens honteuse!

Je téléphone à mon amie : « je rentre, tu seras la pour me prendre dans tes bras ? » « Non je ne serai pas là. » « Mais j’ai besoin de toi, moi! »

Quand j’arrive chez moi, il n’y a personne, le calme, le vide et la douleur…Je me rappelle d’un type qui me draguait…Je lui téléphone : accepterais-tu d’être mon donneur? Le type me dit « oui » « Sida etc c’est ok? » « Oui pas de soucis… » Je lui précise qu’il ne me touchera pas, il est ok aussi…Après avoir prévenu ma meilleure amie de l’endroit où j’allais me trouver et lui avoir donné toutes les coordonnées du donneur, je me suis pointée chez lui vers 19 h… Je lui ai tendu un magazine genre Play Boy avec des superbes nanas… Il m’a dit qu’il voulait me voir nue, que sinon il ne pourra pas… Me voici dans sa piaule à me mettre nue devant lui, je lui tends le flacon et lui dit : n’oublie pas de mettre dans ce flacon ta semence…Je me dégoûte mais dans ma tête je pense à cette dernière piqûre et ces 36 heures…Il ne me reste plus que quelques heures…Pendant qu’il fait son affaire, je pense à ma compagne…Si elle avait était là, si elle m’avait prise dans ses bras, si elle m’avait juste réconfortée, je ne serais pas là, nue devant ce type…

Quelques jours plus tard…Mes règles sont arrivées…

Si la PMA avait été autorisée en France, toute cette histoire ne se serait jamais passée. Si la PMA avait été autorisée, je ne serais pas allée voir une psy en lui disant : je me dégoûte, je suis une moins que rien!

J’ai aujourd’hui 41 ans et les chances d’avoir un enfant s’amenuisent considérablement et je sais bien que malheureusement pour les nanas de plus de 40 balais, nous n’aurons pas le droit à la PMA, Cependant j’espère que la PMA verra le jour pour éviter à des tas de femmes de faire n’importe quoi et se retrouver devant une psy à lui dire : je me dégoûte!

Ce témoignage ne demande pas de jugement, il ne sert que de reflet à ce qui ne se voit pas, une pierre dans l’édifice pour toutes ces femmes seules ou en couple qui désirent un enfant…Ce désir que beaucoup vivent de l’intérieur avec toute cette souffrance et les non-dits…

 

 

Morgane

 

Témoignage d’Herveline (35)

15 Jan

Je suis la maman « sociale » d’une petite fille de 6 ans et demi, mon petit trésor pour qui je donnerais tout, son bonheur passe bien avant le mien… Il n’est pas évident pour moi d’écrire ce témoignage car j’ai l’impression de devoir me justifier pour être reconnue en tant que mère alors que cela est tellement évident pour moi et mon entourage…

Moi et mon ex- compagne avons mûrement et longuement réfléchis avant de démarrer concrètement notre projet d’enfant. Avant cela je n’avais jamais réellement pensé qu’un jour je deviendrai maman mais cet amour avec cette femme était tellement fort que, pour la première fois, est né en moi ce désir de fonder une famille… Nous avions d’abord décidé que je porterai notre premier enfant mais après plusieurs IAD en Belgique, avec donneur inconnu, sans succès… nous avons décidé d’arrêter les frais et finalement ce serait ma compagne qui porterait notre enfant grâce au don généreux d’un de nos amis, ce qui nous a permis également de faire l’insémination en France de manière « artisanale »… Notre fille connait le donneur et sait que la petite graine vient de lui mais celui-ci n’a aucune autorité parentale vis à vis d’elle, c’est ce que nous avions convenu tous les 3 après de longues discussions… et ça ne pose aucun problème pour notre fille ! Elle sait qu’elle existe grâce à cette petite graine mais aussi grâce à l’amour de ses deux mamans, car oui elle est bel et bien le fruit de notre amour !

Ma fille je l’aime autant que si je l’avais portée… sa maman bio et moi sommes aujourd’hui séparées et nous avons mis en place une garde alternée. Nous nous entendons très bien et restons toujours une famille unie… Et je réalise à quel point j’ai de la chance car il serait simple pour mon ex compagne de me couper de ma fille puisque je ne suis rien pour ma fille selon la loi….. Et là dessus je n’ai aucune crainte je sais qu’elle ne fera jamais cela … Mais, car il y a un mais, nous ne sommes pas moi et ma fille à l’abri d’être un jour séparées s’il arrivait un grand malheur à sa maman bio… en effet si elle devait disparaître non seulement ce serait une chose horrible pour notre fille (et moi!!) mais, malgré le testament qu’elle a écrit pour que je devienne la tutrice légale de notre fille, elle pourrait aussi être privée de moi, son autre maman, si la famille de mon ex compagne demandait la garde… La mère de mon ex-compagne, n’accepte malheureusement pas l’homosexualité de sa fille et donc que je sois la mère de sa petite fille … ce qui veut dire que si elle le voulait, elle pourrait faire la demande d’avoir la garde de sa petite fille… et me couper d’elle … Je pense qu’elle aime assez sa petite fille pour ne pas en arriver là mais je n’ai aucune certitude… rien ne nous protège de cette éventualité… et je vis avec cette peur…

Herveline