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Témoignage de Christine (n°20)

24 Avr

Je suis séparée de mon ex compagne avec qui j’ai eu un fils, Yaël. Mon ex est la mère biologique de notre enfant.

 

Lors de notre séparation, il y a deux ans, nous n’étions pas mariées et je n’ai donc pas pu faire de demande d’adoption.

 

Suite à notre séparation mon ex compagne et moi avons fait une procédure de délégation partage d’autorité parentale afin de protéger notre fils.

 

Il m’a également été possible de le faire inscrire sur ma carte de sécurité sociale grâce à l’intervention du service juridique des enfants d’Arc en Ciel qui ont contacté la section MGEN de Puilboreau (La Rochelle). Il est donc possible pour la maman sociale d’avoir un enfant inscrit sur sa carte de sécurité sociale avec un jugement de délégation d’autorité parentale.

 

Christine, maman de Yaël, 5 ans

Témoignage de Cindy (n°19)

19 Fév

Je m’appelle Cindy j’ai 28 ans.

J’ai rencontré celle qui est devenue ma femme en 2013. Elle s’appelle Aurélie, elle a 37 ans et je crois que j’en suis éperdument amoureuse.

Nous décidons très vite d’avoir un enfant. Nous commençons nos démarches en Janvier 2014 pour une PMA en Espagne. Le premier essai est le bon, je tombe enceinte le 26 mars 2014 et notre fille voit le jour le 30 décembre 2014, le bonheur à l’état pur !

Nous laissons notre fille grandir et nous nous lancerons dans l’adoption qu’en novembre 2015 pour le consentement et nous déposerons notre dossier au TGI de l’Indre le 14 janvier 2014 (nous aimons le chiffre 14, il nous porte bonheur). Le 28 février 2016 soit 15 jours après nous recevrons un courrier avec la date d’audience ou l’on nous dit que nous ne sommes pas convoquées et qu’il n’y aura pas d’enquête sociale. Le 11 février 2016 l’audience a lieu et le 13 février soit deux jours plus tard au courrier nous avons LA réponse ! Adoption accordée, nous sommes les mamans le plus heureuses du monde. Notre fille est en sécurité et Aurélie va pouvoir apparaître sur les papiers comme parent légal, ouf, soulagées !

Nous avons énormément de chance, un bébé en 2 mois, une adoption en moins de 1 mois… quand on sait que dans certaines régions il y a des délais d’attente exorbitants, on se dit qu’il y a des inégalités entre les TGI. Nous pensons à celles qui galèrent et on leur envoie des ondes positives.

Nous allons poursuivre notre chemin en famille, et nous pencher sur BB2 en espérant que tout soit aussi simple.

Cindy

Témoignage de Marie (n°18)

22 Déc

Je voudrais partager avec vous quelque chose d’important, dont j’ai réalisé récemment que nombre d’entre nos proches n’avaient pas conscience.

 

Vous n’êtes pas sans savoir que nous avons eu du mal à avoir notre bébé. En effet, il y a 5 ans nous avons commencé, à deux un parcours du combattant. A deux, nous avons cumulé les essais, les trajets, les espoirs et les déceptions.

 

Aujourd’hui, alors que nous sommes mariées, nous avons eu un enfant qui n’a qu’un seul parent. Je suis sa seule Maman. Ma femme, avec qui nous menons ce projet ensemble depuis de longues années, doit maintenant partir dans un nouveau parcours, celui d’adopter notre fille. En fait, la loi (qui, soit dit en passant, nous considère comme un foyer lorsqu’il s’agit de calculer notre quotient familial…), refuse à Stéphanie d’être légalement la mère de Louise. Pour le devenir, elle doit adopter son propre enfant. Concrètement, cela signifie que tant que l’adoption n’est pas prononcée, Stéphanie ne peut pas faire hospitaliser sa fille, ne peut pas gérer son livret d’épargne, ne peut pas lui transmettre son nom, etc.

 

A ce stade, il me tient à cœur de vous rappeler les cinq inséminations, les trois FIV et la fausse couche de Stéphanie durant ces 5 années, qui se sont évidemment ajoutées à mes six inséminations et mes deux FIV, en Espagne et en Belgique. Il convient également de rappeler les milliers de kilomètres que nous avons parcourus à deux, les litres de larmes à chaque résultat négatif, les heures passées à nous piquer le ventre chacune à notre tour, les dizaines de jours d’absence cumulés pour chacun de nos employeurs, les quelques euros dépensés aussi. A deux. Tout ce que nous avons entrepris n’a pu l’être que parce que nous étions deux dans ce rêve de famille.

 

Hier, nous avons été signer un papier disant qu’en tant que seule parent légale de notre enfant, je consens à ce que Stéphanie adopte ma fille. Ce sont les termes. Après j’ai deux mois pour me rétracter, « au cas où ». Au cas où quoi ? Au cas où je voudrais priver ma fille de sa deuxième Maman ? Au cas où je voudrais partir au bout du monde seule avec ma fille sans que ma femme ne puisse rien y faire ? Au cas où je décède entre temps et que ma fille se retrouve orpheline sans que sa Maman puisse rester auprès d’elle, du moins aux yeux (malades, convenez-en) de la loi ?

 

Je tiens à partager cela avec vous, car énormément de nos amis et familles proches n’avaient pas, jusqu’à ce que nous leur en parlions, réalisé que la loi « mariage pour tous », n’a pas embarqué la filiation pour tous les enfants. Je vous passe la situation des enfants de couples non mariés ou séparés, qui, de toute évidence, n’entre pas dans les critères de l’article 345-1 1° du Code Civil, qui dispose que : « L’adoption plénière de l’enfant du conjoint est permise : Lorsque l’enfant n’a de filiation légalement établie qu’à l’égard de ce conjoint ». (« conjoint » = époux/épouse).

 

Nous allons donc monter un dossier avec les preuves de l’engagement de Stéphanie auprès de notre fille. Nous allons récolter des attestations « prouvant » qu’elle est bien une mère pour Louise. Nous allons veiller, au moment des fêtes, à ce que Stéphanie figure sur les photos avec sa fille, afin de tracer ce lien. Nous allons collecter des évidences. Pour un juge (oui un juge, avec un tribunal et un jugement) qui devra autoriser ma femme à adopter ma fille (la sienne donc).

 

Une dernière chose : je ne me plains pas de la loi « mariage sur tous », car sans elle, nous n’aurions pas pu accéder à cette disposition (qui existe depuis bien longtemps mais ne s’applique qu’aux couples mariés). En revanche, considérer qu’il s’agit d’une première étape et que bien d’autres sont encore à franchir avant de pouvoir parler d’égalité ne me semble pas superflu…

 

Merci d’avoir lu jusqu’ici, merci de prendre le temps d’apprendre sur ce type de sujet un peu ardu et de contribuer à faire avancer l’égalité.

 

Marie, administratrice légale pure et simple de Louise, épouse de Stéphanie.

Témoignage de Sabine (n°17)

20 Août

Depuis le temps que je lis vos déclarations sur l’adoption, je peux à ce jour venir témoigner car mon bonheur, notre bonheur, est enfin complet car l’adoption de nos enfants a pu être faite.
Mais surtout que je me refusais à faire tout commentaire tant que nos amies d’Auxerre n’avaient pas de réponse positive et voilà : ce jour est arrivé …

L’adoption de nos enfants par mon épouse a été une formalité.

Nous avons été convoquées au tribunal de Laon le 4 février 2014.

Nous avons été entendues par 5 personnes, juge, greffière, procureur, etc …

La procureur a lu notre parcours et la demande d’adoption : comme quoi nous sommes ensemble depuis 17 ans que nous avons eu 2 enfants par PMA en Belgique, que nous étions mariées depuis le 14 septembre 2013, que les enfants n’avaient pas d’autres filiations … et donc que mon épouse réclamait l’adoption plénière …

Suite à ça, la juge s’est adressée aux enfants en demandant à notre fille son âge, ce qu’elle comprenait et si elle voulait dire quelque chose .(Il est vrai que mon épouse et moi même, nous étions refusées à leur expliquer des choses que nous même ne savions pas, nous avons toujours été très vagues, quand nos enfants nous ont demandé : on va venir avec vous dans la salle? On ne sait pas. Est-ce qu’on va nous poser des questions? Ben ça non plus on ne sait pas, peut être on verra bien. Mais ne vous inquiétez pas, nous sommes là et si vous voulez sortir mamie est dans la salle d’attente.) Voilà ce que nous leur disons.

Et quand nous avons été appelées, on nous a précisé que les enfants devaient nous accompagner.
Ce fut la plus grande peur et angoisse de notre vie.

Notre fille, très angoissée, a répondu qu’elle comprenait et qu’elle n’avait rien à dire de plus à part qu’elle était d’accord …

Notre fils lui nous a surpris aux larmes, lui, si timide et réservé, du haut de ses 6 ans et demi, il a croisé ses mains et a dit au juge qu’il était joyeux que la loi ait fait ça et puis la timidité a repris le dessus.

La juge a sourit, elle lui a dit qu’elle comprenait ce qu’il voulait dire …et lui a demandé s’il était d’accord …Il a répondu : heuuuu oui ….

Après ils se sont longtemps regardé et chacune d’entre elles ont fait oui de la tête …
La juge s’est alors adressé aux enfants en leur disant que personne ne s’opposaient à cette adoption.

Elle nous a demandé les noms de famille que nous avions décidés de porter et pourquoi.

Et après ça …
La juge a regardé les enfants et leur a dit que maintenant ils avaient 2 mamans.
Je peux vous assurer qu’à ce moment ni mon épouse ou moi même étions capable de retenir nos larmes …

La juge a fini en nous disant d’aller fêter ça comme il se doit.

DONC CHAMPAGNE

Je souhaite ce bonheur à tout le monde, tout vient à point à qui sait attendre ….

 

Sabine

 

 

Témoignage de Christelle (n°16)

19 Août

Retour sur une procédure…

Aujourd’hui, nous vous faisons partager cette lettre datée du 8 mai 2014 car les adoptions ont enfin été prononcées et le Parquet n’a pas fait appel.

 

 

A Mme Taubira, Ministre de la justice, Garde des sceaux

 

 

Madame la Ministre,

 

Je ne sais par où commencer…un aveu déjà, jamais personne en politique jusqu’à ce jour ne m’avait autant fait vibrer Madame, oui vous m’avez fait vibrer, pleurer et rêver et pas en première instance en tant que lesbienne non en tout premier lieu en tant que femme et philosophe de formation.

Dans cette arène, face à tous ces lions haineux, je vous ai admirée et avec toutes ces envolées lyriques jusqu’au bout de la nuit de l’assemblée, ces citations en référence à Levinas, l’altérité, l’empathie, Nietzche ,Damas, les Lumières et j’en passe…je me suis revue étudiante : rebelle, femme et combattante vingt ans auparavant, j’ai vécu ce projet de loi jour et nuit, mon ipad à la main , vous déteniez la clef de ma cage et de ma prison et vous m’avez libérée chaque jour un peu davantage jusqu’au vote solennel !!! Ce jour là, j’ai vécue ma renaissance.

Ceci est mon ressenti personnel mais c’est aussi et surtout une histoire familiale. A 18 ans je suis tombée amoureuse d’une femme. Aujourd’hui 26 ans de couple, directrices d’écoles toutes les deux , deux enfants de 12 et 10 ans conçus par PMA en Belgique, enfants brillants , nous n’avons jamais connu de problème dans notre vie quotidienne, bien acceptées nous menions notre petit chemin, oui mais voilà, mère sociale tout au fond de moi j’avais appris depuis des années à me taire , à apprendre à n’être rien face à la loi, c’était une habitude, un destin malgré moi, j’avais déjà la chance d’avoir des sourires d’enfants le soir en rentrant chez moi , j’étais maman dans mon cœur et dans le cœur de mon fils et de ma fille…déjà énorme  malgré une douleur sourde acceptée envers et contre moi! Surtout nous protégions nos enfants et ne disions rien de cette précarité jusqu’à …..2012 et l’engagement 31 !!!

Oui, là nous y avons cru, là nous avons voulu expliquer aux enfants en âge de comprendre ce qu’il se passait, sûres de gagner, fières, nous avons évoqué ce que nous avions tu : la précarité, l’insécurité. Nos enfants, fièrement, ont défilé aux manifestations à Paris en comprenant complètement ce qu’ils étaient en train de faire, interviewés par RFI, Le Monde, ils n’ont pas hésité de leur propre chef à répondre, à évoquer leur bien être et fierté de leur famille.

Notre mariage a été fabuleux, trop de monde pour une salle des mariages. C’est en salle des fêtes avec micro devant 200 personnes qu’un clip sur vous et vos plus beaux discours a été projeté sur écran géant et que nous nous sommes dit oui au bout d’un quart de siècle sous les yeux de nos enfants.

Ces derniers, avec un formidable courage, nous ont fait la surprise de lire un discours bouleversant sur le mariage et sur l’adoption, sur l’amour qu’ils me portent !

Huit mois ont passé, l’horreur l’angoisse, un dossier archi complet déposé en novembre au TGI d’Auxerre , à vrai dire pour côtoyer beaucoup de familles comme les nôtres je n’en connais pas d’autres similaires, plus de vingt attestations d’amis de professionnels de l’éducation , de psychologues, de directeurs d’écoles et quand bien même notre couple serait plus jeune et nos enfants de même,  le résultat serait le même, avis du procureur : saisine pour avis de la Cour de cassation*, stupéfaction, frais d’avocat non négligeables en attente de l’avis du juge, les enfants n’y comprennent rien et franchement nous ne trouvons aucun argument tenable : victoire de la manif pour tous, recul du gouvernement….

C’est terrible mais en pleine entrée dans l’adolescence pour eux, cette loi, j’en arrive à la regretter, cassés en plein envol d’idéal, mes enfants s’étaient inventés une signature avec mon nom, ils l’écrivent sur chacune de leur copie à l’école chaque jour, me demande pourquoi nous sommes invités aux fêtes d’adoption de leurs copains et copines et pourquoi eux ne le sont encore pas….

L’enfer est pavé de bonnes intentions disions nous en philo mais c’est exactement ce que nous vivons.

Moi je voudrais si vraiment il n’y a rien à faire que vous me remettiez en cage Madame et si vous pouviez refermer la grille à double tour s’il vous plaît en jetant la clef, cela me consolerait peut être d’avoir exposé mes enfants et d’avoir pointé sur eux un statut dont ils n’avaient pas conscience jusqu’ici. Pour autant cela ne m’enlèverait pas ma culpabilité. Ils étaient heureux, ils sont devenus anxieux et ce n’est pas de notre faute ni de la vôtre, je connais et comprends les enjeux et consensus politiques, je sais ce que vous-même avez enduré, humainement un vrai scandale ; avec vous mes enfants auront combattu le racisme et toute forme de discrimination.

Bien sûr nous ne nous laisserons pas remettre en cage, affaiblis mais déterminés nous combattrons envers et contre tout, nous partirons s’il le faut même en Belgique mais avant mes enfants veulent essayer coûte que coûte d’être adoptés par moi même.

Sur le sol français leur pays, non! Ils ne sont pas des bâtards de la République !

Membre des enfants d’arc en ciel nous mènerons notre bataille avec toutes nos familles en France parce que l’Etat nous attaque ici dans ce que nous avons de plus chers, nos enfants. Et nos enfants sont notre valeur première, leur bonheur conditionne notre bonheur !

Nous ne laisserons aucun enfant fragilisé et dans l’insécurité !

Je sais ce que vous pensez Madame dans votre for intérieur, la France en est-elle réduite aujourd’hui à de telles situations, n’y a-t-il vraiment rien à faire au niveau du législateur. Par tradition, la gauche n’intervient pas au niveau des juridictions mais la tradition Madame ne devient elle pas enlisement lors qu’elle dessert la juste cause et l’intérêt de l’enfant ?

Merci au nom de ma famille et de toutes les autres dans la même situation de m’avoir lu Madame.

Pour m’avoir permis de dire oui à celle que j’aime depuis vingt cinq ans je sais qu’en tant que femme intellectuelle et politique vous ne pouvez en restez là.

Recevez madame la ministre la certitude de ma profonde considération.

 

Christelle, membre des Enfants d’Arc en Ciel-l’asso.

 

 

*Ce dispositif, qui permet aux juges du fond qu’une question de droit nouvelle fait hésiter de surseoir à statuer et de saisir la juridiction suprême de son ordre pour obtenir un éclaircissement, répond à un double objectif :

– permettre une unification plus rapide de l’interprétation de la règle de droit ou plutôt des règles de droit nouvelles ;

– assurer la prévention du contentieux, des voies de recours, parce que, tout de suite, la portée de la loi est dite par la juridiction qui a le dernier mot.

Pour en savoir plus, cliquez ici

 

 

 

Témoignage d’Aurélie (n°15)

18 Juin
Tout a commencé le 12 décembre (soit un mois environ après notre  mariage) lorsque nous avons envoyé notre requête au TGI de Niort.
Nous avons reçu une convocation pour une audience au TGI le 12 mai. Nous étions 3 couples à attendre dans le couloir.
Nous avons été auditionnées par une juge, une procureur, une greffière et une autre personne du ministère public. L’ambiance était bienveillante.
La juge a relu  la lettre que ma conjointe avait écrite pour accompagner sa requête. Nous y indiquions notre PACS , notre demande de rattachement de notre fille sur sa carte vitale à la CPAM ( qui n’avait pas abouti ), son attachement très fort envers notre fille.
La procureur nous a dit qu’elle émettait un avis favorable à notre demande d’adoption plénière de notre fille par ma femme, car notre fille n’avait de filiation légalement établie qu’à mon égard. Elle nous a précisé que nous pouvions appeler dès le 16 juin et c’est ce que nous avons fait dès le matin-même mais pas de réponse par téléphone car grèves au TGI alors dès la débauche, visite au TGi et là:  excellente nouvelle : adoption plénière accordée ! (d’ailleurs la greffière m’a dit qu’il en était de même pour les 2 autres couples) .
Nous n’avons plus qu’à aller faire compléter notre livret de famille 🙂
Aurélie.

Témoignage de Maud (n°14)

13 Juin

Le 16 mai 2014, par une procédure gracieuse le TGI de Quimper nous accordait l’adoption croisée de nos deux filles.

Je viens ici vous faire un témoignage de ce moment important de notre vie.

Isa et moi nous sommes rencontrées en septembre 1998 entre les murs d’une institution religieuse à vocation enseignante. Isa y louait une chambre et moi, j’y arrivais pour préparer mon entrée dans la vie religieuse (un pré-postulat). Dès que nos yeux se sont croisés, j’ai su que ma vie serait liée « très étroitement » à la sienne. S’en est suivie une période de doutes et de crise de foi pas facile à gérer pour deux catholiques qui découvraient la puissance de l’ Amour « différent », jetées dans un débat sur le PACS où certains de nos amis et notre famille ( ignorant bien entendu la force de notre relation) se livraient à une homophobie « bien pensante ».

Il nous a fallu plusieurs années pour passer aux yeux de notre entourage de l’état de « colocataires » à celui d’ « amantes » et je dois dire que celui de « couple » est toujours « difficile » à digérer pour nos familles d’origine. Alors quand nous avons envisagé des enfants dans notre vie, cela a été un tsunami dans nos relations… Même nos frères et soeurs n’ont pas aidé à faire avancer nos parents. Nous y voyons bien sûr des questions d’intérêts divers mais cela nous fait violence encore aujourd’hui.

Il est évident qu’en choisissant  cette incarnation avec ce contexte familial nous avons à penser constamment à cette notion « d’égalité »

Après un parcours assez long de PMA en Belgique et un changement de stratégie, nous avons eu le bonheur d’attendre nos deux petites mouflettes.

Et quand est arrivé le changement politique que nous attendions depuis longtemps, notre espoir de voir reconnaître notre famille est devenu intense. Nos familles d’origine n’y parvenant pas ,nous nous sommes dit que si la république le faisait elles seraient bien devant leurs incohérences sociétales et devraient faire un pas vers nous… Mais la force de leur système leur phagocyte le coeur et le cerveau… La religion au lieu de « relier » (= du latin religare) peut « délier » voire devenir un « cancer » de la famille…

Voilà donc pour le contexte familial…

J’en reviens au contexte historique et politique :

Automne 2013 : Le futur examen du projet de loi « mariage pour tous » passe des couloirs de l’Assemblée Nationale aux trottoirs et pavés de la rue et inonde sans discernement cet espace virtuel qu’est Internet. Sous couvert de pseudonymes les invectives se fichent complètement des lois qui régissent notre pays et l’homophobie est devenue le jeu à la mode… Nous lisons les pires horreurs sur notre compte tout cela venant d’hommes et de femmes qui droits et droites dans les bottes de l’Eglise (le fameux lobying papal qui donne tous les droits puisque venant de la droite du Père…) cherchent à développer les instincts les plus bas et les peurs les plus ancrées dans les esprits emprisonnés par cette institution millénaire.

Nous nous posons la question : mais que leur volons-nous en cherchant à acquérir les mêmes droits ?

19 janvier 2013 : Lors d’une manifestation pour l’Egalité à Quimper nous interrogeons notre député présent, sur le projet de loi en cours de discussion à l’ Assemblée Nationale et lui demandons concrètement comment cela va se passer pour l’adoption de nos filles. Après quelques photos ce dernier nous promet une réponse rapide et prend « toutes » nos coordonnées… Nous n’avons jamais eu de réponse… Pourtant quand quelques mois auparavant, juste avant les législatives nous avons questionné son attaché de presse, ce dernier nous avait envoyé un message mail pour nous garantir de sa position pour le mariage, l’adoption et la PMA…

23 avril 2013 : la loi « mariage pour tous » est votée aux cris de « EGALITE-EGALITE ». Nous frissonnons devant notre « ordi », pleurons chaudement autant que lorsque nous avons accompagné par la pensée les présidente et vice-présidente des Enfants d’arc en ciel quelques semaines plus tôt devant les députés.

Personne ne sait encore le « réel contenu » de cette loi à part que nous allons pouvoir nous marier. Pour nous deux le mariage n’est pas une fin en soi mais juste le moyen de protéger nos enfants.

17 mai 2013 : François Hollande promulgue la loi « mariage pour tous », cela fait aussi 7 ans que nous nous sommes pacsées : un chouette anniversaire !

Fin juin 2013 : Nous allons voir notre maire (apparenté UMP) pour poser la date de notre mariage :

C’est OK pour lui et nous serons le premier couple à nous marier dans la toute nouvelle mairie !

Juillet passe à une vitesse de dingue… La tête dans les préparatifs, on essaye de ne pas remarquer que presque personne dans nos familles ne s’associera à notre union… Depuis 15 ans on commence à faire avec…

17 août 2013 : à 10h 30 devant la mairie se rassemblent nos amis, un frère d’ Isa ainsi que sa femme et ses enfants . Finalement dans les dernières semaines notre mariage a changé de statut dans nos deux têtes et ça nous fait tout bizarre de voir notre amour célébré « au grand jour », nous qui avons signé notre PACS sur un coin de table d’un placard à balais du TGI de Saint-Denis face à une greffière sans sourire.

26 août 2013 : rendez-vous avec la notaire pour le consentement à l’adoption

30 août 2013 : signature du dit consentement

Fin octobre 2013 : rencontre avec notre avocate et début de la constitution de notre dossier.

On fait marcher la photocopieuse du bourg à fond la caisse et on court après les attestations diverses : nos amis nous font pleurer régulièrement quand on lit leurs témoignages : ça fait un bien fou de lire l’affection qui nous lie après ces mois de tension animés par ceux qui ne veulent pas l’égalité des droits et qui tentent par tous les moyens de faire plier le gouvernement.

10 décembre 2013 : dépôt des requêtes pour l’adoption plénière des filles

3 janvier 2014 : avis favorable du parquet ( qui nous sera transmis par notre avocate une semaine avant l’audience)

21 mars 2014 : audience  «  bienveillante » avec le juge, sa greffière et la procureur.

Nous sortons « heureuses » même si le jugement est mis en délibéré pour le 18 avril 2014 puis prorogé au 16 mai et que nous pressentons la difficulté de l’attente…

16 mai 2014 : ça y est nous SOMMES toutes les deux MAMANS des deux mouflettes !

Tout s’est « presque » passé sans anicroches…

C’est vrai que le temps nous a paru long durant ces 9 mois… 9 mois : le temps de faire un troisième enfant ? Le temps de la sérénité ?

Nous apprenons notre bonne nouvelle alors que des vagues d’ homophobie se déchaînent dans d’autres TGI notamment celui de Versailles ( ville où nous avons nous-mêmes de la famille royaliste…) Nous n’arrivons pas à décolérer… Nos enfants sont protégés, certes mais nos copines sont dans la mouise à cause d’une « demie-loi » qui les soumet aux idéologies d’un autre âge…

L’égalité scandée par nos députés le 23 avril 2013 n’existera que lorsqu’elle retrouvera son unité c’est à dire lorsque nous pourrons comme n’importe quel couple aller déclarer notre enfant en mairie avant ou dans les trois jours qui suivront sa naissance…

L’égalité n’existera que lorsque nous pourrons «  faire famille » en France , sans avoir besoin de passer les frontières de notre pays.

L’égalité n’existera que lorsque nous ne serons plus obligées de nous marier pour protéger nos enfants…

Je pense à nos couples d’amies qui sont séparées et qui n’auront pas la même chance que nous…

Et je pense à toutes celles qui vont peut-être être obligées d’ aller jusqu’à la Cour Européenne des droits de l’homme pour obtenir ce misérable papier qu’un couple hétéro lambda met deux minutes montre en main à obtenir…

Quand je pense à ma belle-mère qui nous avait prévenu que si la loi était votée nous ne pourrions pas compter sur elle pour assister à notre mariage car cela serait « offenser Dieu », je me souviens aussi de ce mot « phare » asséné par elle et tous nos opposants : MENSONGE.

Ce mot est une arme à double tranchant et il est clair que dans cette volonté de faire stagner notre société, nos adversaires, à force de l’utiliser à tort et à travers ont eu le mérite de rendre lucides ceux qui l’hiver dernier encore préféraient penser que notre lutte pour l’égalité était « presque » un acquis…

Aujourd’hui, nous ne pouvons pas attendre qu’un éventuel changement passe par la tête des hommes et femmes qui ont obtenu nos suffrages.

Il faut les interpeller à toutes les occasions pour qu’ils prennent conscience que nous ne sommes pas un dossier parmi d’autres, mais des êtres humains nés dans le pays des droits de l’homme et du citoyen, qui ne bénéficions pas des mêmes droits que les autres et dont les enfants souffrent de leur manque de courage politique.

15 années ne peuvent pas encore passer sans que cette situation ne soit résolue…

C’est à nous avec cette « sainte colère » au creux des tripes, cette lucidité au fond du coeur et ce « vrai » amour du prochain de faire partir les marchands du temple pour que les valeurs de notre pays LIBERTE-EGALITE-FRATERNITE ne soient pas que des mots gravés sur les pierres mais s’incarnent au plus profond de chacun…

 

Maud

Témoignage de Sophie (n°13)

22 Mai

Voici la teneur des entretiens séparés dont nous avons fait l’objet ma femme et moi au commissariat, dans le cadre de nos requêtes en adoptions déposées au TGI de Nanterre en janvier.

La policière a été transparente avec nous et nous a prévenu tout de suite, l’une et l’autre, qu’elle avait un document transmis par le TGI, pôle police dans mon souvenir, et que nous devions nous attendre à des questions très précises.
Elle a été très respectueuse et compréhensive vis à vis de notre situation.

Ma femme a eu la présence d’esprit de noter par écrit toutes les questions qu’elle a du nous poser. Allez, on y va ?

Après avoir recueilli ma grande identité l’agent de police a reçu instruction de me poser les questions suivantes :

1. Quel a été le mode de conception de l’enfant ?
2. Avez vous eu recours à une PMA ?
3. Avez vous fait une demande d’adoption au conseil général ou avez vous sciemment eu recours à une PMA à l’étranger sachant que cela était interdit en France ?
4. Quel a été le coût de cette PMA ?
5. Où a-t-elle été réalisée ?
6. Y a-t-il un père connu, identifié ou identifiable ?
7. Pourquoi voulez vous adopter et est-ce un projet de couple ?
8. Quelle est l’antériorité de votre couple par rapport à l’enfant ?
9. Les enfants sont-ils au courant ou avez-vous prévu de les informer quand ils grandiront ?

Ensuite la policière nous a demandé si nous avions des choses à ajouter.

Potentiellement elle pourrait se rendre à notre domicile pour vérifier que les conditions d’accueil sont réunies.

Pas mal non ?
Notre préférence va à la question 3, deuxième partie : avez-vous sciemment eu recours à une PMA à l’étranger sachant que cela était interdit en France ?

Bon. Nous étions sonnées en ressortant. La policière nous a précisé que jamais ces questions n’étaient posées à des hétéros. Que jamais dans notre commune (45000 habitants) une enquête avait été diligentée pour une adoption au sein d’un couple hétéro non plus.

Nous qui nous étions entraînées à botter en touche en cas de questions ouvertes…

Voilà.
Nous pensions fêter nos adoptions en 2014.

Le TGI de Nanterre dépend de la cour d’appel de Versailles.
Nous nous attendons maintenant à une longue épreuve.
Et la colère nous tient devant cette nouvelle discrimination et cette volonté si peu masquée, de nous humilier un peu plus.
Mais nos ressources ne sont pas taries évidemment, et nous allons nous battre

Témoignage de Sandrine (n°12)

13 Mai

Nous sommes passées devant le tribunal d’Évreux pour l’adoption plénière de notre fille ce jour (le 9 mai 2014)

A peine rentrées dans la salle d’audience le juge nous a énuméré nos identités et a donné la parole au Procureur. Cette dernière, sans nous demander quoi que ce soit, s’est opposée à l’adoption prétextant que la PMA était interdite. Personne lui a dit que c’était par PMA mais elle est restée là dessus.

J’ai demandé à m’exprimer cela a été très rapide, quelques phrases, en gros 3 minutes. J’avais préparé des attestations sur l’honneur de diverses personnes, j’ai demandé si cela valait la peine que je les donne vu que la décision du Procureur était prise. Le juge m’a dit oui vous pouvez me les donner nous étudierons quand même.

En dernière phrase je leur ai demandé si il arrive quelque chose à ma femme qu’allait devenir ma petite fille que j’ai toujours élevée ? Aucune réponse ! C’est scandaleux à notre époque de voir que des tribunaux ne prennent même pas la peine d’écouter les parents de l’enfant afin de les faire peut être changer d’avis… Nous recevrons le verdict définitif au mois de juin mais je m’attends pas à des miracles. Ma femme était en pleurs et je ne pouvais rien dire pour sortir toute ma colère . Le couple avant nous même décision, en 15 minutes c’était terminé.

Sandrine

Témoignage d’Hélène (n°11)

17 Mar
Voici un témoignage positif !!! En effet nous n’avons pas eu toutes les difficultés attendues et je dirais même que nous ne sommes tombées que sur des personnes bienveillantes d’un bout à l’autre de la « chaîne » adoption.

Pour situer tout d’abord notre famille : ma compagne et moi nous sommes mariées le 6 Juillet 2013 alors que j’étais enceinte de notre petit bonhomme Cléanthe, né le 22 du même mois. Nous vivons à Dunkerque. Nous avons déposé mon consentement d’adoption chez le notaire fin septembre. Deux mois plus tard, dès le délai de rétractation passé, nous avons signé la demande officielle et notre notaire nous a mis en contact avec une avocate en décembre.  C’est elle qui a tout transmis. Notre notaire a été très rassurante dès le début en stipulant que la loi allait s’appliquer sans difficulté et elle était heureuse pour nous. Nous avons reçu une lettre de l’avocate très rapidement nous notifiant notre demande et rendez-vous a été pris le 25 janvier 2014. Notre avocate nous a aussi rassurées et nous a conseillé de faire des attestations au cas où le Juge les demanderait. Elle nous a donné quelques exemplaires à compléter. Nous les avons fait remplir de suite par nos proches (amis, famille, nounou, médecin, sept au total) au cas où… et nous avons bien fait car nous avons reçu la lettre de l’avocate stipulant notre convocation au TGI et la demande d’attestations le 7 mars pour le  14 mars !
Nous voilà au Tribunal et là encore nous avons rencontré des personnes très bienveillantes de la greffière au président. Celui-ci a présenté notre situation et notre avocate a corroboré notre demande ; le procureur a pris la parole pour préciser que le ministère public ne voyait aucune objection à l’adoption et voilà !!! Quel bonheur d’entendre le juge prononcer l’adoption et nous féliciter avec un grand sourire ! Nos yeux ont brillé… On s’est senties une vraie famille et pas différente des autres qui attendaient dans le couloir. Tout le monde se félicite dès la sortie du tribunal c’est agréable !!! La cour a juste regretté de ne pouvoir « admirer » (sic) notre petit homme ; au vu de son âge,nous l’avions laissé chez Nonou car nous ne savions pas qu’ils faisaient passer les famille avec les enfants en premier.
Désormais il faut attendre les changements d’Etat civil qui peuvent prendre du temps après le délai de recours d’un mois (eh oui encore un !!! ) La prochaine étape sera donc de pouvoir rattacher Cléanthe à notre livret de famille unique.

Nous ne pensions pas que cela irait si vite et ce ne fut pas le parcours du combattant ! Voilà, courage à toutes, quels que soient les juges, la loi est pour nous !

Hélène

Témoignage de Carmin (n°10)

23 Fév

Avez-vous vu « Les 12 travaux d’Astérix » ? Vous rappelez-vous du 8ème ? Celui où nos héros doivent obtenir le laissez-passer A-38, mais pour lequel ils doivent d’abord obtenir le formulaire A-39 selon la circulaire B-65 dans une administration (française sûrement, quoique). Ca y est vous vous souvenez ? Alors bienvenue dans mon monde !

Nous voilà donc, quelques années en arrières toutes les 2 (je ne dirais pas qui fait Obélix ou Astérix, hein) au pied d’un bâtiment immense et une petite voix pour nous donner le top départ « Voici votre épreuve : construisez une famille ! Prêtes ? Feux, partez ! ».

Oui parce que tu crois quoi ? Que le plus dur c’était de prendre conscience de ton homosexualité, de l’accepter, de faire ton coming out (au pluriel ce serait plus judicieux) et de changer de vie pour suivre ton nouvel amour ??? Ben non en fait ! Mais heureusement ça se joue à 2 et avec beaucoup d’Amour, la meilleure des potions bien sur.

Alors c’est parti, on entre dans ce bâtiment, y a tellement de monde mais si peu qui nous regarde ou nous écoute que nous ne savons par où commencer. On n’a peu d’armes, peu de moyens, on tente le Pacs … bien mais pas top, toujours pas une « vraie » famille. On continue. Ah, on a trouvé un stand avec une asso « Les Enfants d’Arc-en-ciel », super ! Des réponses, des idées, du soutien, on se lance ! Et on en fait des allers, des retours chez le doc, au labo, en Belgique. On y perd des plumes, mais on ne se décourage pas et on a raison : juin 2012 notre bébé vient au monde.

Puis faut s’armer pour la bataille du mariage, idem, des marches, des manifs, des jets d’insultes, des élections, des suspens mais toujours pas de passoire sur la tête, on avance, on s’épuise mais on avance. Aout 2013, on se dit « oui » ! On y est presque …

On parvient donc à d’autres bureaux, d’autres questions, d’autres formulaires. D’abord le notaire pour le consentement d’adoption. 2 mois et 250 euro plus tard place à l’avocate (non obligatoire, c’est un choix) qui pourra déposer notre dossier au tribunal. Mais il faut le construire ce dossier. Là j’avoue que la passoire n’est pas loin. Des tonnes de documents officiels, bon là il suffit de patience. Par contre ce qu’on ne savait pas c’est combien ça nous couterait en perte d’intimité et en « ravale ta fierté » quand il nous faut demander aux gens d’écrire noir sur blanc qu’ils ont été témoins que nous étions bien une vraie famille, que ma femme aimait et s’occupait de notre fils comme une mère, comme elle s’occupait de ses 2 premiers enfants …

Et puis c’est arrivé. La passoire est venue s’assoir sur ma tête à la seconde où j’ai compris qu’en plus de tout cela je devrais demander l’avis mais surtout l’avis favorable de l’ex de ma femme, le père de ses ainés, le représentant du plus petit, trop jeune selon la loi pour donner son avis. Et puis heureusement on se reprend, on est 2, on s’aime encore, toujours, alors une fois la colère criée, on reprend ses esprits. Puisqu’il le faut, faisons-le ! (avons-nous le choix ?) On n’est plus à ça près. Alors on court dans tous les sens pour réunir toutes les pièces de notre dossier, les photos de nous, de notre intimité, les témoignages, les preuves, pour qu’ils puissent être déposés au tribunal, au juge, un inconnu, l’ultime boss du jeu.

Voilà, c’est là où nous en sommes aujourd’hui en février 2014. On s’apprête à affronter sa décision, va-t-il demander une enquête sociale ? Verrons-nous la gendarmerie débarquer chez nous pour savoir si notre fils a un lit et du lait ? Ou le dossier lui suffira-t-il pour juger que oui  nous sommes déjà une famille ? Comme c’est dur de se suspendre à cette décision, comme c’est injuste, comme ça me met en colère. La dernière ligne droite, allons-nous remporter cette épreuve ? à suivre, très vite je l’espère. Pourvu que tout se termine bien avec de la bonne musique sans barde et un bon banquet convivial !

Carmin

 

Témoignage de Marjolaine (n°9)

4 Fév

Premier chapitre

Ce soir, le moral n’y est pas ; j’ai l’impression d’avoir subi une violence terrible, d’être absolument désarmée pour m’en protéger, d’avoir d’autant moins de hargne à me défendre que j’ai moi-même du, sciemment, agir contre mon gré, contre mes opinions, contre mon choix de vie.

Que les autres n’y comprennent rien, prennent cela à la rigolade alourdit encore la sourde angoisse que génère l’acte que je viens de commettre.

J’ai l’impression d’être flouée, dépossédée de ma liberté de mouvements, d’avoir du me parjurer, d’être une traitre à la cause, enfin, bref, cela m’est insupportable.

Et pourtant nos subconscients ont vaillamment résisté, eux, si l’on songe que nous avons du nous y reprendre à de nombreuses fois avant de parvenir enfin à déposer notre dossier de mariage en mairie.

Je vous épargnerai les premières tentatives avortées mais les dernières valent leur pesant de rires (amers) :

Mardi dernier en huit (nous ne disposons de temps commun sur les horaires d’ouverture que le mardi après midi entre 14 et 16h00), notre dossier est enfin complet. Nous nous présentons au guichet des mariages. L’employée nous demande de produire les pièces obligatoires (pièces d’identités, justificatif de domicile, extraits d’acte de naissance, etc.). Nous nous apercevons que l’extrait d’acte de naissance de ma compagne a mystérieusement disparu de la pochette. Comme j’ai à faire au centre ville, elle propose de faire l’aller et retour jusqu’à la maison pour prendre ce fichu papier. Trente minutes plus tard, elle me téléphone : Elle l’a déniché. Une heure plus tard, nous nous retrouvons devant le bureau. L’employée prend l’extrait d’acte de naissance et nous découvrons que c’est soit un acte de naissance, mais qu’il s’agit d’un des miens datant de plus de trois mois.

Mardi dernier, nous retournons à la mairie, avec nos actes de naissance respectifs et pas « périmés », et là, je ne retrouve pas ma carte d’identité (laissée le midi même ainsi que tout mon portefeuille au domicile de copains chez lesquels j’ai déjeuné). Pas le temps de faire l’aller et retour.

Et là, nous sommes jeudi, le dossier est enfin déposé, et j’ai les boules.

Bon, je n’ai pas pu laisser vierge la case : Enfants du couple, j’ai écrit bien proprement les prénoms, noms et dates de naissance des filles, mais toute gênée, l’employée m’a « fait comprendre » qu’elle ne pouvait laisser écrit « enfants du couple » pour des enfants de notre couple.

Lorsqu’elle nous a demandé si nous voulions passer des musiques particulières, j’ai bien essayé de suggérer « Ni Dieu ni maître » ou « Société, tu m’auras pas ! », mais j’ai failli me prendre un coup de coude dans les côtes en plus du regard courroucé de ma compagne, qui n’aime pas les esclandres, ni les remarques improductives.

Dire qu’il y en a plein qui ont des enfants légitimes hors mariage et que nous, nous n’en avons pas le droit. Dire qu’on va devenir les gens les plus rangés des voitures (un mariage ? Deux bagnoles ? Un caniche ? Deux enfants. Une bagnole ? Une télé ? Un permis de chasse ? Un pavillon de banlieue ?) après des siècles de mise au ban de la société ! Dire que dans deux semaines, ils publieront les bans et qu’il va falloir dire « oui » alors que spontanément, je n’aurai jamais eu l’idée de m’alourdir de fers institutionnels. Depuis quand a-t-on besoin de l’accord de l’état pour s’aimer, de preuves, de contrat devant la loi pour savoir ce qui est le mieux pour nous deux ?

Je crois que c’est cette idée, de devoir attester publiquement de mon amour et de m’attacher à l’état par le mariage qui me répugne profondément. Je n’ai rien à prouver ni à crier sur les toits et je préfère a priori le maquis à la grand place. Sauf que là, aujourd’hui, en France, la discrimination dont nous sommes victimes ne laisse pas le choix : Pour être mère de ses enfants, il est obligatoire de se marier.

Nous nous marions dans trois semaines, mais après les démarches d’adoption, aurons-nous encore les moyens financiers de divorcer ?

Marjolaine

Témoignage de Séverine (n°8)

2 Fév

Après 3 ans de vie commune et à l’approche de la trentaine, ma compagne et moi décidons d’avoir un enfant, ce qui, pour un couple de même sexe nécessite TOUJOURS un (très) long de temps de réflexion pour savoir comment, pourquoi, quelles conséquences etc. Pour nous la réflexion a duré 1 an avant de commencer la moindre procédure. Je tiens à le rappeler, et à mettre ça en regard avec le fait qu’il nous faut ensuite PROUVER que nous sommes bien les parents de nos enfants alors que certains couples hétéros pour qui c’est l’  « accident » n’ont rien à prouver (et heureusement!)….

Garance, dont je suis la mère « sociale », est donc née en août 2012, période où après l’élection de François Hollande nous pensions légitimement que tout serait plus facile, la suite nous prouve que… pas tout à fait…

Récit de l’adoption en cours en 6 actes.

1- Trouver l’information, ou comment se découvrir des compétences juridiques inconnues….

Comment savoir quelle est la procédure à suivre ? Faut-il un avocat ? Quelle est cette histoire de notaire ? Doit-on vraiment se marier avant ? Pour nous renseigner, nous contactons une juriste de l’antenne locale du Planning familial, qui nous oriente vers le Conseil Général, compétent en matière d’adoption. Apparemment il y aura enquête sociale. Le Conseil Général nous informe qu’il ne s’occupe que d’adoption internationale, donc ça n’est pas de leur ressort. Nous apprenons en cherchant par nous-même, et grâce aux associations de familles homoparentales, que notre procédure relève de « l’adoption de l’enfant du conjoint ». Personne d’autre ne semble au courant…

Nous décidons de nous passer d’avocat, non pas pour des raisons financières (ce qui est le cas pour plusieurs couples de notre entourage), mais par conviction, car ça nous semble injuste de devoir payer pour prouver que je suis bien la mère de Garance.

 2- Le TGI, ou le royaume de la fausse information

Première rencontre avec le TGI : « ah non pour adopter il vous faut 2 ans de mariage ». On explique que non, dans le cas de l’adoption de l’enfant du conjoint, pas besoin. On nous donne donc un formulaire à remplir. Arrivées à la maison, on s’aperçoit qu’il s’agit du formulaire d’adoption à l’étranger. Retour au Tribunal, mêmes explications pour enfin récupérer le bon formulaire. Ce qui est rageant, c’est que cette procédure n’est pas nouvelle, elle existe pour les hétéros, alors qu’on ne nous fasse pas le coup de « Oui mais il faut qu’on s’adapte à la nouvelle loi ! ». Nul n’est censé ignorer la loi, et si maintenant la simple citoyenne doit la connaître mieux que le TGI…

J’ajoute que selon les TGI, le discours n’est pas du tout le même : soit c’est une « simple procédure administrative », soit il faut « prouver le lien à l’enfant ». Egalité du citoyen devant la loi, donc…

3- Le mariage, ou comment renoncer à ses convictions

Si nous souhaitions évidemment que le mariage soit ouvert à tout-e-s, nous n’aimons pas son institution pour nous-même et ne pensions donc jamais nous marier. Selon l’INED, il y a en France, en 2012, 56 % de naissances hors mariage. Qu’est donc censé prouver le mariage dans ce cas précis de l’adoption de l’enfant du conjoint ? Rien ! C’est obsolète et inutile, pour les hétéros comme pour les homos. Nous nous sommes donc mariées par obligation en août 2013.

4- Le notaire, ou comment payer 250 € pour un travail mal fait, qu’on doit refaire soi-même

Une fois chez le notaire, il avait écrit « adoption simple » sur le consentement alors que nous souhaitons demander la plénière. Nous lui faisons donc modifier sur le consentement. Mais une fois l’attestation de non-rétractation reçue, il est à nouveau mentionné « adoption simple ». Nous appelons donc le notaire pour faire changer, ce qu’il refuse, arguant que c’est la loi et que son juriste le lui a confirmé. Nous avons du nous battre avec le notaire pour faire figurer la bonne mention sur l’attestation, correspondant à notre requête auprès du Tribunal.

5- Le dossier, ou comment enrager de devoir prouver une évidence

Constitution du dossier : en plus des pièces administratives, pour se border on apporte la preuve que je suis bien là depuis l’origine, et que je m’occupe de ma fille comme n’importe quelle mère au quotidien. Témoignages de la famille, du médecin, de l’employeur, photos etc. Tout ça prend du temps. Et fait monter la colère de devoir prouver à la Justice ce que tout le monde autour de moi, et ma fille la première, sait déjà : je SUIS sa mère !

6- L’attente, et la colère

On nous a annoncé 5 à 6 mois de délai. Ce qui nous laisse assez de temps pour ruminer la chose suivante : dans un couple hétéro, si le couple a recours à un don de sperme en cas d’infertilité de l’homme, que se passe-t-il à la naissance ? Le père, qui n’est donc pas plus le père biologique que moi la mère biologique, va en mairie et déclare l’enfant. Basta. On veut simplement le même droit, est-ce trop demander ?

Séverine

Témoignage de Clothilde (n°7)

28 Jan

Les difficultés ont commencé lorsque nous avons évoqué notre désir d’avoir un enfant.

Nos familles étaient déjà réticentes à cette idée, tout comme elles l’étaient sur notre homosexualité. Nous avons dû d’abord, nous battre contre leurs préjugés et leurs craintes, avant de se lancer concrètement dans notre projet d’avoir un enfant.

Nous avons alors cherché des études, des livres sur l’homoparentalité qui prouveraient le « bien fondé » de notre désir d’enfant à notre entourage. Un enfant élevé par 2 femmes n’évolue ni mieux ni pire que n’importe quel autre enfant. Notre enfant est désiré, attendu et aimé avant même d’être dans nos bras. Il a été longuement réfléchi. Il n’est pas le fruit d’un accident. Combien de couples se posent autant de questions avant de faire un enfant?

Mes parents ont toujours refusé ce projet d’enfant. Ils sont pourtant aujourd’hui 2 grands-parents aimants et attentionnés pour mon fils, que ma compagne a porté. 4 ans de débats, pour mûrir notre projet avant de se lancer réellement. Comme quoi tout peut évoluer.

Puis concrètement, nous avons ensuite demandé à notre gynécologue habituelle, qui nous a conseillé un hôpital Edith Cavell à Bruxelles en Belgique. Car lorsqu’un couple de femmes françaises qui s’aiment et désirent avoir un enfant, et qu’il leur manque la gamète mâle, le spermatozoïde sain, elles ne peuvent demander l’aide de leur propre pays pour recevoir l’aide médicale d’un centre de Procréation Médicalement Assisté (PMA). Elles doivent se tourner vers une autre nation où cela est légalement autorisé et encadré: la Belgique, l’Espagne, l’Angleterre, les Pays-Bas, le Danemark, le Canada…

Nous avons pris RDV par téléphone avec la Belgique avec un délai d’attente d’1 mois. Puis les dépenses ont commencé. Mais pas que. Nous avons dû poser des jours de congés pour ce RDV, prendre des billets de train Thalys, une nuit d’hôtel à Bruxelles. Nous sommes ensuite retournées voir notre gynécologue habituelle en France pour qu’elle nous délivre une ordonnance de suivi médical, comme ferait n’importe quelle femme qui voudrait avoir un enfant et vérifier qu’elle est fertile. Nous avons ensuite communiqué les résultats de ces examens à Edith Cavell, qui nous a donné finalement son accord pour obtenir leur aide (6 mois d’attente pour passer en commission chez eux). Je précise que cela fut possible, car nous étions un couple reconnu par un PACS. Puis Edith Cavell a prescrit un traitement hormonal qui n’est pas anodin à ma compagne, qui porterait l’enfant. Ce traitement est contraignant en temps, en argent et pour sa santé. Comme convenu, nous avons demandé son avis avec notre gynécologue habituelle et lui avons envoyé nos ordonnances belges à retranscrire en ordonnances françaises. Elle ne nous a jamais recontacté malgré nos relances.

Nous avons recherché en catastrophe un second gynécologue, qui nous suivrait tout au long de notre parcours, jusqu’à l’accouchement. Ma compagne a fait joué ses relations de travail, ce qui l’a obligé à faire son coming-out professionnellement, sans savoir comment tout le monde allait réagir. Ce gynécologue a été notre sauveur.

Prise de sang et échographie des ovaires tous les 2 jours pendant 10 jours à jeun le matin, avant d’aller au travail, demander à recevoir les résultats avant midi, pour les communiquer à Edith Cavell, qui nous donne alors 36h pour venir les voir et pratiquer l’insémination (acte médical pratiqué par un gynécologue: dépôt de sperm d’un donneur anonyme dans le vagin à l’aide d’une pipette spéciale, c’est ça une IAD). Autant vous dire que les heures sont comptées à ce moment là. Prévenir nos employeurs que nous ne serons pas là le lendemain, et du jour au lendemain c’est un risque à prendre pour ma carrière professionnelle, tout comme ça l’a été pour ma compagne d’être régulièrement en retard à cause des examens médicaux matinaux. Alors qu’il aurait été tellement plus simple, si nous avions pu être suivies dans l’hôpital à côté de notre domicile. Trouver des billets de train au dernier moment au tarif maximum, youpi. Rentrer en France et espérer en attendant 14 jours, avant de faire une prise de sang pour savoir si on est enceinte ou pas. Et recommencer jusqu’à tomber enceinte enfin.

Après le suivi de grossesse se fait avec notre gynécologue habituel, comme toute femme enceinte. Bref ça a certes un certain coût financier: examens médicaux, déplacements, hôtellerie, jours de congés, frais médicaux d’insémination… mais pas que. Nous avons du débourser en 2 ans de quoi s’acheter une voiture. Oui une belle voiture neuve! Ces démarches nous auraient peut-être coutée qu’un plein d’essence, si ce parcours de PMA avait été autorisé et pratiqué en France à côté de chez nous. Mais pas que. C’est un sacrifice conséquent sur nos revenus, aucunes vacances, aucuns vêtements neufs, aucun achat superflu, rien que du nécessaire absolument nécessaire. Mais pas que. C’est aussi se sentir rejeter de notre pays, notre pays qui nous a vu naître, nous a élevé, que nous soutenons aux JO et lors des grandes rencontres sportives internationales avec notre cœur.

Depuis le moment, où ma compagne est tombée enceinte, nous n’avons plus rencontré de difficultés insurmontables. Nous les pulvérisions sur place. Les préjugés des gens ne nous gênaient plus. Nous prenons depuis le temps de nous montrer telles que nous sommes, nous sommes comme tout le monde: nous respirons, nous avons du sang dans nos veines et nous aimons, voilà tout. Nous avons essuyé quelques dégâts sur mon véhicule (pneus crevés, rétroviseur cassé, essuie glace arraché, plaque d’immatriculation arrachée et cassée), notre voisin était ouvertement homophobe et nous pourrissait la vie dès qu’il le pouvait dans le quartier et auprès de notre bailleur. Des voisines amicales nous signalaient être témoins de ses dégâts. Bref nous avons depuis déménagé et ne subissons plus ce personnage.

Lorsque notre garçon est né, nous avons eu par chance une place en crèche pour lui. La directrice ne voulait pas me parler n’étant pas  » la vrai mère de l’enfant ». Au bout de quelques semaines et à force de politesse et d’échanges, elle a évolué et a fini par me parler et m’offrir même des cafés, comme tout parent de la crèche.

Ma compagne étant la seule parent reconnue légalement, je n’avais pas le droit légalement d’emmener notre fils chez le médecin, même en cas d’urgences je n’étais qu’un tiers, personne aux yeux de la loi, impossible de prendre une décision médicale, pourtant il a bien fallu aller le faire recoudre lors d’une chute à la crèche. J’étais la plus proche à pouvoir intervenir, j’ai pu déposer mon fils aux urgences, mais attendre ma compagne, la seule mère reconnue car mère biologique, pour l’en faire sortir. Plein de situations deviennent absurdes rapidement.

Nous avons alors entamé avec une avocate une procédure de demande de délégation d’autorité parentale DAP, 1 an de procédure au TGI (Tribunal de Grande Instance) de Paris et 3600 euros plus tard, le juge aux affaires familiales nous l’a accordé heureusement. Ça fait cher payé pour avoir le droit de sortir son enfant de l’hôpital, de l’emmener chez le médecin. Dans le même Tribunal de Grande Instance, un couple d’amies dans la même situation se l’est vu refuser sans motif réel. Un sentiment de justice à la « loterie ».

Depuis nous avons milité pour obtenir la possibilité de nous marier: l’appel de Montpellier en 2009. C’est une bataille au quotidien,  pour dire à tout le monde que nous sommes comme tout le monde, et que nous méritons les mêmes droits et les mêmes devoirs.

Nous nous sommes mariées en décembre 2013, dans une petite commune de Loire Atlantique, le maire a dû prévenir et demander les services de la gendarmerie car Mr le maire avait reçu des menaces « d’abrutis armés » comme il disait. Nous avons demandé au procureur de la République l’autorisation de ne pas publier sur les bans de notre mariage notre adresse de domicile, pour ne pas donner l’adresse de notre domicile aux « abrutis armés ». Nous sommes mariées sous protection de la gendarmerie, tout s’est bien déroulé finalement.

Nous souhaitions ensuite entamer la procédure d’adoption. Nous nous sommes d’abord renseignées auprès de l’association les enfants-d’arc-en-ciel- l’asso! et de son forum. Puis nous avons été au TGI de Nantes, pour se renseigner sur place. Chaque TGI a sa propre procédure. La personne du service civil et adoptions nous a annoncé que ma compagne (mère biologique) perdrait ses droits, si je demandais l’adoption de mon fils, et que je ne pourrais adopter qu’en adoption simple et non en forme plénière. Totalement faux! Nous avons du lui expliquer qu’elle devait être mal renseignée, qu’elle devrait demander l’avis du greffier en chef. Un comble! Former, celle qui doit nous informer de nos droits!! Le greffier en chef lui a confirmé par téléphone que nous avions raison et indiqué les documents pré-imprimés à remplir. Nous avons ensuite contacté notre notaire de famille, qui nous a reçu 2 jours après notre mariage: « parce que vous avez déjà trop attendu pour ça ». Nous avons signé un acte notarié de consentement à l’adoption plénière, nous attendrons les 2 mois, délai de rétractation légal. Puis notre notaire pourra attester de notre non-rétractation à ce consentement. Avec tous ces documents et quelques autres (actes de naissance, certificat de mariage, livret de famille…) nous allons déposer notre demande d’adoption plénière de l’enfant de mon épouse, celui que j’élève depuis sa naissance et désire depuis plus longtemps, par une requête auprès du service adoptions du parquet du TGI de Nantes. La greffière nous a indiqué un délai de 6 à 8 mois de procédure. Que faire pendant encore ces 8 mois s’il arrivait malheur à mon épouse? Elle n’a su quoi me répondre.

Nous avons donc commencé la procédure en justice pour demander l’adoption plénière de l’enfant du conjoint en espérant obtenir victoire. Mon fils de 4ans 1/2 deviendrait bientôt mon fils légalement dans 6 à 8 mois. Il aura alors plus de 5 ans. Enfin, si le juge m’autorise à devenir son parent. Et pour le second enfant? Tout recommence…

Clothilde

 

Témoignage d’Anne (n°6)

26 Jan

Publié le 26 janvier 2014:

Je m’appelle Anne. Je suis mariée à Marie depuis le 9 novembre 2013. Bien sûr nous nous sommes mariées par amour, mais surtout, nous nous sommes mariées pour que je puisse adopter Théophile, 3 ans, issu de mes gènes et porté par ma compagne. Pour nous, le mariage était le premier acte de cette adoption, de ce nouveau parcours du combattant. C’était une fête très réussie, remplie d’amour, de bonne humeur et surtout d’espoir…

En 2012, nous avions tenté de demander une DAP (délégation d’autorité parentale) à la justice. Elle ne nous avait pas été accordée par le TGI de Versailles dont nous dépendons. Je m’étais entendue dire que j’avais le même rôle qu’une nounou, à qui personne n’accorde d’autorité parentale, et qui assure pourtant les mêmes actes que moi auprès des enfants. En tant que maman, cette phrase restera gravée en moi pour le restant de mes jours.

Cet enfant, nous l’avons voulu, nous l’avons attendu pendant 4 ans. Quatre années durant lesquelles nous avons vécu au rythme des prises de sang à 7h du matin, l’angoisse d’arriver en retard au travail, l’angoisse aussi de demander des jours de congés au dernier moment pour nous rendre en Belgique, la crainte d’être « découvertes » par la sécurité sociale, la crainte que notre gynéco soit ennuyé et ne veuille plus nous suivre, la crainte à chaque instant clandestin… Et la douleur… La douleur à chaque insémination, la douleur liée aux fécondations in vitro, la douleur de chaque échec… Et l’espoir… L’espoir de fonder une famille avec celle que j’aimais, l’espoir quand je lui ai dit d’essayer de porter mes embryons puisqu’en moi ils ne voulaient pas se développer… Ce bonheur quand le test de grossesse a affiché positif et que c’est moi qui l’ai vu en premier… Ces larmes lors de la première échographie, lorsque ce petit haricot s’est mis à avoir un cœur qui battait tellement plus vite encore que le nôtre… J’ai été là tout le temps. J’ai repeint la chambre de notre enfant, je lui ai acheté ses habits premiers âge, j’ai porté les sacs de courses pour que ma compagne ne se fatigue pas trop, j’ai compté les jours, les semaines de grossesse, je les ai cochées sur mon calendrier, j’ai écrit au jour le jour pour me souvenir de tout…

Théophile est né par césarienne en urgence, j’étais là lors des premiers soins, je l’ai apaisé au son de ma voix, j’ai donné le premier biberon, j’ai été là toute la semaine à la maternité, tous les jours, et la nuit je rentrais pour faire des lessives et rapporter du linge propre le lendemain matin à la première heure… C’est moi qui ai prévenu la famille, les amis, de la naissance, c’est moi qui ai envoyé les premières photos, c’est moi qui suis allée le déclarer à la Mairie, accompagnée de ma petite soeur… Un bonheur si intense que personne ne pourrait le décrire.

L’enfant a grandi, il s’est mis à marcher, à parler, il m’appelle Maman Nanoue, il appelle ma compagne Maman Mayé… Je le console quand il se fait mal, je lui prépare de bons petits plats, je l’emmène chez le pédiatre quand il est malade, je vais le chercher à la crèche le soir, je lui donne son bain, je perds un temps fou à la pharmacie pour trouver pour lui une bouteille de bain moussant qui convienne à sa peau fragile, il appelle mes parents Papy et Mamie, mes sœurs Tata, c’est mon fils.

Trois ans plus tard, j’en suis là. Je dois adopter mon propre fils.

Nous avons tellement l’habitude de devoir galérer que cela ne me semble qu’une étape de plus dans notre parcours. Presque comme si c’était normal de devoir subir cela. Nous nous renseignons donc avec pragmatisme sur la procédure. Comment devenir légalement la maman de mon enfant ? Comment faire pour que je ne sois plus un « tiers » pour lui aux yeux de la loi ? Pour que plus personne, jamais, ne puisse me séparer de lui, ne puisse le séparer de moi ? Pour qu’il puisse, aussi, hériter de moi, de mes parents, tout comme les enfants que mes sœurs auront ? Comment faire pour officialiser mes devoirs envers lui, pour que ma compagne ne puisse jamais se retrouver seule à élever cet enfant que nous avons tellement voulu à deux si jamais la vie nous séparait ? C’est bizarre de penser à ces éventualités alors qu’on parle de se marier, mais les circonstances font que nous sommes obligées de les évoquer…

Après le mariage, nous avons donc pris rendez-vous avec un notaire pour constituer la première pièce du dossier (le consentement de ma compagne à l’adoption de son enfant par son conjoint), qui nous avait été conseillé par une amie.

Le premier rendez-vous eu lieu le 18 décembre 2013. Nous avons fait garder Théophile par une amie et nous sommes rendues toutes les deux en plein Paris pour un rendez-vous d’environ ¾ d’heure. Ce notaire paraissait bien informé de la procédure, et nous a expliqué que l’adoption plénière était irrévocable, et qu’il était de son devoir de nous en informer, de nous dire qu’il fallait bien y réfléchir, car si demain nous devions nous séparer, après l’adoption nous serions à égalité devant la loi. Cela tombe bien, c’est exactement ce que nous souhaitons !

Le notaire nous a alors proposé de rédiger ce consentement à l’adoption, puis de nous donner un nouveau rendez-vous pour le signer, le 30 décembre. Lorsque nous lui avons dit que nous dépendions du TGI de Versailles, il a eu un air dépité, et nous a dit alors : « Oh là là, Versailles, ils sont réputés très conservateurs, j’espère que vous l’obtiendrez quand même… Et puis vous ne pouvez pas vous faire domicilier ailleurs, ce serait une faute… » Ce genre de remarque, on ne peut pas dire que cela donne du baume au cœur… Nous craignons en effet beaucoup ce TGI, parce que nous y avons déjà subi une défaite, et nous avions déjà compris à ce moment-là que l’égalité de traitement n’existait pas d’un TGI à l’autre. Nous avons donc la malchance de déposer notre requête au mauvais endroit, sans possibilité d’en changer…

Le 30 décembre, nous sommes retournées chez le notaire, avons signé le consentement à l’adoption (et nous sommes délestées de 250 euros au passage…), et avons également remis au notaire une « tutelle testamentaire », expliquant qu’en cas de décès de ma compagne, sa volonté est que Théophile puisse rester avec moi. Ubuesque… Mon fils pourrait en effet m’être enlevé, parce que je ne suis pas sa mère. Pour le moment. Jusqu’à quand ?

Le sort de notre fils, de notre famille, dépend donc d’un procureur, d’un juge, du bon vouloir de l’administration… Cà et là, nous lisons des témoignages réconfortants. Certaines familles ont déjà obtenu l’adoption plénière, et leurs enfants ont donc deux parents, deux mamans, aux yeux de la loi. Leurs enfants sont protégés. Cela nous donne de l’espoir. Mais et nous ? Est-ce que nous aussi nous y aurons droit ? Est-ce qu’on me dira bientôt que je suis légalement la maman de mon fils, comme je le suis aux yeux de mes amis, ma famille, mes collègues, de ma compagne, à ses yeux à lui surtout ? Est-ce qu’on pourra bientôt souffler ?

Du haut de ses trois ans, Théophile pose des questions… C’est quoi un notaire ? Pourquoi on va le voir ? Pourquoi je dois lui dire : « Bonjour Maître ? » Nous lui expliquons qu’après le mariage, il faut faire une adoption. Il comprend, un peu, pas tout. Je lui dis que je veux être sa maman légalement, et que pour cela nous devons faire des papiers. Je lui dis que de toute façon quoi qu’il arrive, je suis sa maman. Que je le serai toujours. Qu’il est mon fils. Que bientôt, on les aura, ces papiers. Je le rassure.

Mais qui me rassure, moi ?

Anne

Publié le 3 janvier 2016

Il y a quelques mois, je publiais ici mon début de parcours pour adopter mon fils (témoignage numéro 6). Je vous ai laissés au moment où mon épouse signait le consentement à l’adoption de son fils par sa compagne (donc moi !) devant un notaire, fin décembre 2013.

Nous avons décidé de prendre une avocate, pour nous aider à constituer notre dossier. Afin de prouver aux magistrats que oui, je m’occupais bien de mon enfant. Que oui, j’étais bien sa maman aux yeux de tous, sauf aux yeux de la loi.

Nous avions une épée de Damoclès au-dessus de nos têtes depuis la naissance de Théophile : que se passerait-il si ma chérie venait à disparaître ? Mon fils et moi pourrions être séparés ! Et s’il y avait une urgence médicale ? Je ne pourrais pas rester au chevet de mon enfant, ni même aller le chercher à l’hôpital sans l’accord de ma compagne ! Plus concrètement, je n’ai pas pu être « déléguée de parents d’élèves » à l’école, parce qu’il fallait avoir l’autorité parentale… celle que le TGI de Versailles m’avait refusée en 2012 ! J’étais sa maman, et pourtant, à chaque fois que je disais « mon fils », j’avais l’impression d’être une usurpatrice… Moi qui l’avais tant voulu, tant désiré, moi qui l’aimais de toutes mes forces…
Après notre échec devant le tribunal de grande instance (TGI) de Versailles en 2012, nous avons lâchement décidé de ne pas être les premières à déposer un dossier dans ce tribunal.

D’autres l’ont donc fait avant nous (bravo les filles, vraiment !). Malheureusement, nous avons appris fin avril 2014 que leur demande d’adoption avait été rejetée par le juge. Il a en effet argué que le recours à la procréation médicalement assistée, illégal en France pour les couples homosexuels, rendait l’adoption de l’enfant impossible. Les mamans auraient été coupables de « fraude à la loi ».

Devant cet échec, nous nous sommes senties assommées. Alors que dans d’autres juridictions, ces adoptions ne posaient pas de problème, chez nous, elles devenaient impossibles ! Nous avons même pensé à déménager, à louer un appartement ailleurs. Je me suis renseignée partout pour savoir si c’était envisageable, mais il a rapidement fallu se rendre à l’évidence : nous devions rester dans notre juridiction, sinon nous aurions commis une faute et l’adoption aurait été également compromise…

Un jour, pendant la sieste de Théophile, j’ai appelé une avocate. Mon fils s’est réveillé juste après que j’aie raccroché. Je précise qu’il dormait à l’étage supérieur et que j’avais téléphoné dans la pièce la plus éloignée de sa chambre, porte fermée…

Au réveil, il était en sueur, à tel point que j’ai dû le changer ! On est descendu et on a commencé à lire des livres. Je lui ai donné à boire, et tout à coup il s’est mis à pleurer, hurler, sans pouvoir s’arrêter. Il est « coutumier » de ces crises, et je sais qu’il y a toujours quelque chose derrière. Mais là, je ne voyais pas quoi… J’ai essayé de le réconforter. Il pleurait et hurlait : « Je n’arrive pas à être bien ! » et « J’ai mal ! ». Je lui demandais où il avait mal, je lui nommais même des parties du corps (la gorge, la tête, le ventre, le dos ?). Il disait qu’il ne savait pas, qu’il n’était pas bien et qu’il ne pouvait pas s’arrêter. Il gesticulait des bras et jambes en s’accrochant à moi et en pleurant.

J’ai tenté la musique, le sirop pour la toux, l’eau, la fenêtre ouverte pour avoir de l’air frais, les massages… Il pleurait, pleurait, pleurait, et disait qu’il ne pouvait pas se calmer. Je l’ai assis sur moi et j’ai dit : « C’est l’adoption ? » Il a respiré profondément et m’a dit : « Oui ». A-t-il entendu quelque chose quand je téléphonais ? Franchement, ça me parait improbable…

Je lui ai demandé s’il voulait que je lui explique. Il m’a dit que oui. Et j’ai parlé.

« Tu sais que pour faire un bébé, il faut une graine de monsieur et une graine de dame ? Et donc pour te faire, tu sais que maman et moi, nous sommes allées chercher une graine de monsieur à l’hôpital. Un monsieur qu’on ne connait pas mais qui a donné sa graine pour qu’on puisse t’avoir? »

Il m’a dit oui. Alors j’ai continué :

« Eh bien, il y a des gens qui pensent que, parce qu’on a fait ça et qu’on est deux mamans, on n’est pas une vraie famille. Pour qu’on soit une vraie famille dans la tête de ces gens-là, il faut qu’on ait un papier qui s’appelle l’adoption. Mais c’est juste un papier. Et ce sont des problèmes de grands.

Toi, tu es un petit garçon. Tu n’as pas à gérer les problèmes des grands. Toi, ton boulot de petit garçon, c’est de jouer, d’apprendre, d’aller à l’école, de faire des bêtises aussi un peu, mais pas de gérer les problèmes des grands. C’est maman et moi qui sommes inquiètes pour cette adoption, c’est vrai, mais ce n’est pas ton problème à toi.

Et tu sais, je vais te dire autre chose : ce n’est pas un problème très grave, parce que nous, on sait qu’on est une famille. On s’aime, on sera toujours tes deux mamans, on sera toujours là pour toi, et personne ne peut nous enlever ça. Tu le sais ? Nous on est une famille, quoi qu’il arrive, tu comprends ? J’aime ta maman Mayé, elle elle m’aime, toutes les deux on t’aime, et toi tu nous aimes. C’est ça qui compte, pas le reste. Et pour toute la famille, c’est pareil, avec les papys, les mamies, les tatas et les tontons… On est une famille, c’est ça qui est important, et ça c’est sûr, tu vois ? »

Il faisait oui avec la tête. Puis il m’a dit : « C’était ça qui me tracassait. » Je lui ai demandé : « Est-ce que ça va mieux maintenant ? » Et il m’a répondu : « Est-ce que j’ai loupé l’heure du goûter ? »

Vous en tirerez les conclusions que vous voulez, mais moi, ça m’a encore plus donné la rage. La rage de me battre pour mon fils et pour notre famille…

Les rebondissements ne se sont pas arrêtés là : en octobre 2014, saisie notamment par le TGI d’Avignon, la Cour de Cassation a émis un avis selon lequel, finalement, la PMA ne constituait pas une fraude à la loi. Elle n’était donc pas un obstacle pour les adoptions intra-familiales. L’espoir est revenu dans notre foyer… Et avec raison, puisque en décembre 2014, nous avons appris que des enfants avaient pu être adoptés par leurs mamans « sociales » dans notre juridiction versaillaise !

Nous avons alors constitué notre dossier, demandé des attestations à nos proches et réuni plus de vingt témoignages, tous plus adorables les uns que les autres, affirmant que nous étions une famille, que Théophile était un enfant heureux avec ses mamans, et qu’il était temps que je puisse l’adopter officiellement. Nous avons également joint des photos, de nous, de la famille élargie (grands-parents, arrières-grands-parents, oncles, tantes, cousins…), des photos qui respiraient le bonheur. C’était d’ailleurs bizarre de constituer une requête comme celle-là : à la fois humiliant de devoir demander des témoignages pour prouver que nous étions de bons parents, et très gratifiant de constater qu’en fait, les gens avaient une belle image de nous !

Fin janvier 2015, nous avons finalement déposé le dossier complet au tribunal, par l’intermédiaire de notre avocate. L’attente a commencé…

Fin avril, n’ayant aucune nouvelle de notre dossier, j’ai appelé notre avocate pour savoir si elle en avait (sait-on jamais, hein ?)… Elle s’est renseignée et a fini par obtenir l’info le jeudi 7 mai : le jugement était prévu le mardi suivant, soit le 12 mai ! Sans convocation à une audience, ce qui voulait dire qu’a priori, notre dossier allait passer sans problème ! J’ai su aussi que le parquet ne s’était pas opposé à la demande…

À ce moment-là, j’ai été tellement soulagée ! J’ai appelé tout de suite ma chérie au boulot pour le lui annoncer, j’ai appelé mes parents… C’était une vraie bonne nouvelle, comme on n’en avait pas eue depuis longtemps!

Le mardi 12 mai, j’ai pensé toute la journée à ce jugement. Je n’arrivais pas à me l’enlever de la tête, même si je savais que je ne saurais rien le jour-même…

Le lendemain matin, j’ai fait des pieds et des mains pour obtenir des infos, et l’avocate a fini par me dire que normalement, c’était bon ! J’ai essayé en vain d’appeler le tribunal… Finalement, je suis allée faire quelques courses en bas de chez moi, et quand je suis rentrée, le facteur était en train de distribuer le courrier.

J’ai attendu sagement, et il m’a dit, en me tendant une enveloppe de papier kraft : « Ah bah ça, ça doit être pour vous ! » Un recommandé avec accusé de réception et le tampon du TGI de Versailles dessus ! Autant dire que je ne m’attendais pas à le recevoir si vite !

En ouvrant l’enveloppe et en voyant écrit noir sur blanc que l’adoption était prononcée, j’ai éclaté en sanglots toute seule chez moi !

Puis je suis allée chercher mon fils à l’école, et je lui ai expliqué qu’enfin, on avait le papier pour l’adoption, que les tracas étaient finis et qu’on était bien reconnus comme une famille. Il m’a écoutée mais n’a rien montré de particulier…

En arrivant dans l’appartement, il a vu l’enveloppe et les papiers sur la table de la cuisine. Il m’a demandé : « C’est ça, les papiers ? » J’ai dit que oui. Alors, il a voulu que je lui lise. Puis il a dit : « Bon, je vais écrire mon nouveau nom ! » (En effet, il a changé de nom de famille avec cette adoption, puisque nous avons ajouté mon nom à celui de ma compagne). Je lui ai donné une feuille, il a écrit son prénom (en fait, il l’a écrit en rébus : T O fil ) et m’a demandé d’écrire son nom en entier (un peu dur, ça, encore !). Enfin il m’a dit : « On le met avec les papiers ! »

Affaire classée, en somme…

Un peu plus tard, pendant qu’il se lavait les mains avant de passer à table, il m’a dit : « Et tous ceux qui disent qu’on n’est pas une vraie famille… Eh ben, je vais leur envoyer le papier, moi ! »

Il nous restait alors à faire inscrire notre fils sur notre livret de famille commun, après avoir reçu son nouvel acte de naissance. Cet acte de naissance pouvait être modifié après que le TGI aurait envoyé les directives à la mairie de naissance de l’enfant, et bien sûr après les quinze jours de rétractation qui m’étaient octroyés, des fois que je veuille changer d’avis et ne plus adopter mon fils…

Bien sûr, les rebondissements ne se sont pas arrêtés là.

Fin juin 2015, nous avons reçu un nouveau recommandé : il s’agissait d’un deuxième jugement, rectificatif du premier, parce que sur le premier, le TGI avait oublié de notifier les prénoms de l’enfant (le pauvre n’avait plus de prénoms !). Nous avions vu cette erreur, mais comme nous n’avions pas modifié les prénoms de notre fils, nous n’avions pas pensé que cela aurait une conséquence. Nous avons donc dû attendre encore les 15 jours obligatoires de rétractation, et comme tout cela nous menait à l’été, nous avons laissé passer les vacances.

Début septembre, j’ai appelé le TGI pour savoir où en était notre dossier, et si la demande de transcription du nouvel état civil de Théophile avait été fait. Réponse : « la mairie nous a renvoyé le dossier car il y a eu une erreur dans le jugement : nous avions mis la ville de naissance de l’enfant dans le mauvais département et ils ont donc refusé la transcription, mais le jugement va être refait le 8 septembre… »

Patience étant mère de toutes les vertus, nous avons donc attendu de recevoir le troisième jugement, en espérant que cela soit le dernier ! Puis il a fallu encore attendre 15 jours afin que je puisse éventuellement me rétracter (notez que cela m’a laissé beaucoup de temps pour réfléchir à la question…).

Après ce délai, j’ai rappelé le TGI qui m’a dit (Ô miracle !) que l’ordre de changer l’acte d’état civil de mon fils partait le jour même à la mairie de naissance.

Quelques semaines plus tard, le 22 octobre 2015, j’appelais la mairie de naissance de mon fils pour savoir s’ils avaient reçu l’ordre de modifier l’acte de naissance de Théophile. Je suis tombée sur une charmante dame qui m’a dit qu’elle était en train de le modifier, justement (c’est ce qui s’appelle timing parfait !). Je demande donc immédiatement sur le site internet de la mairie un acte de naissance intégral avec mentions de filiation de mon fils.

Une semaine plus tard, le 27 octobre 2015, je reçois une lettre de la mairie, j’ouvre fébrilement l’enveloppe… pour découvrir que l’acte de naissance était complètement faux : mon fils était subitement né le 24 janvier 2015 (au lieu de 2011), et les noms des parents n’apparaissaient plus du tout, c’était comme s’il était né de… personne ! Je rappelle la mairie, qui me dit qu’effectivement il y a un problème, qu’ils vont le résoudre, etc… Moi, je suis furieuse, cela fait si longtemps qu’on attend !

Finalement, nous nous déplaçons le vendredi 30 octobre à la mairie, tous les trois, munis de notre troisième jugement, de nos deux livrets de famille et de nos trois cartes d’identités. Nous sommes rapidement reçus par une employée de mairie qui nous délivre enfin le précieux sésame : l’acte de naissance modifié de notre fils, avec son nom désormais complet, et la mention de ses deux parents, mon épouse et moi-même ! Cette employée, dans la foulée, inscrit notre fils sur le livret de famille qui nous a été délivré lors de notre mariage, presque 2 ans jour pour jour avant…

Nous sommes rentrés à la maison, avons pris des selfies de nous trois avec nos papiers à jour, et avons bu le champagne avec mes parents, qui venaient passer le week-end avec nous.

Voilà, la boucle est bouclée pour nous. Nous sommes une famille. Nous sommes tous les trois vraiment soulagés. Nous pensons encore à celles et ceux qui galèrent, pour avoir un enfant, pour l’adopter, pour avoir juste les mêmes droits que tous les autres citoyens. Il reste du boulot mais petit à petit, on avance, et ça fait du bien à nos enfants.

Anne